1968

Publié le par Ph NAUDIN

1968 – 1969 : UN TOURNANT DANS LA CINQUIÈME RÉPUBLIQUE

 

 

 

 

Situation :

➢     Sous le second septennat du Gal De Gaulle, (élu au suffrage universel)

➢     Les problèmes sociaux sont apparemment réglés...

➢     L'économie est en plein essor, avec la réussite du plan Pinay-Rueff...

Donc : le mécontentement monte !

 

I - La montée du mécontentement social

 

La croissance continue au rythme de 5% l'an, mais le partage des fruits en étant inégal, des tensions apparaissent dans le tissu social. De plus les structures mêmes évoluent rapidement :

 

1.     On assiste à un renversement des valeurs  : en effet, c'est l'industrie qui devient le moteur de l'économie ; sa part du PNB augmente alors que la France rurale dépérit :

➢     l'exode rural s'accentue avec la mise en place de la PAC (= politique agricole commune);; avec la concurrence communautaire, de nombreuses exploitations familiales trop traditionnelles et peu rentables ont disparu entre 1962 et 1968 : 800 000 paysans ont quitté la terre.

         ⇒ Les manifestations se multiplient en Bretagne au cours de l'année 1961 : la loi-cadre qui devait favoriser la restructuration de l'agriculture n'a pas donné les résultats escomptés.

➢     Seconde conséquence : les jeunes ruraux gagnent les villes où les équipements sont insuffisants pour les accueillir ; c'est l'origine des constructions inadaptées du type HLM et du phénomène de banlieue : c'est le « mal-vivre » de la fin des années 60.

 

2.    L'inflation joue sur le pouvoir d'achat : c'est un principe bien connu en économie « Quand les prix montent par l'ascenseur les salaires montent par l'escalier de service », autant dire que le pouvoir d'achat est grignoté peu à peu. La répartition des fruits de la croissance est encore une  fois pipée, d'autant plus que le « plan de stabilisation » de 1963, dit « plan Giscard » a bloqué les salaires.

           ⇒ Les manifestations et les grèves se succèdent dans le secteur public : en 1963, la grève des mineurs durera 2 mois, en plein hiver, à une époque où le chauffage domestique se fait essentiellement au charbon, de même que la production d'électricité... Bref, la France se gèle !

 

Des négociations sur les salaires s'engagent, mais en 67, le gouvernement réduit par ordonnance le rôle des syndicats dans la gestion paritaire de la Sécurité sociale.

 

3.    La traduction politique : au referendum de 1962, de Gaulle malgré l'opposition de tous les partis politique (sauf l'UNR) est approuvé par 61,7% des Français dans son projet de faire élire désormais le président de la république au suffrage universel. A noter que la Constitution de 58 avait été adoptée avec 79% des  voix :  l'érosion de la popularité du Général va se poursuivre...

§         présidentielles de 1965 : réélu au 2ème tour avec seulement 55% des  voix ;

§         législatives de mars 67 : la majorité présidentielle est reconduite de justesse (285/487) ;

§         législatives de juin68 : après dissolution de l'Assemblée nationale en mai 68, un sursaut du « parti de l'ordre » le conforte pour un temps ;

§         mais, lors du referendum de 1969 sur la réforme du Sénat et la régionalisation, le « non » l'emporte à 52,4%.

 

C'est l'échec et la cause directe de la démission de De Gaulle, le 28 juin 1969. En fait, il avait prévenu que si la majorité des Français refusait cette réforme institutionnelle (établissant en particulier la décentralisation des pouvoirs vers les régions), il quitterait le pouvoir : les Français ont voté contre De Gaulle plutôt que contre la décentralisation, dont en fait personne ne contestait réellement la nécessité, (sauf les notables et Giscard d'Estaing !).

Ni « la participation », c'est-à-dire l'intéressement des salariés aux résultats de l'entreprise sous forme d'actions, ni la réforme de l'enseignement par Edgard Faure (loi-cadre d'octobre 68), ni le remplacement de Pompidou par Couve de Murville ne suffiront à calmer le jeu.

 

En fait, le phénomène de bipolarisation de la vie politique française apparaît clairement : un pouvoir conservateur et une base contestatrice, qui veut obtenir rapidement satisfaction, soutenue par les forces de gauche.

 

II – les évènements de mai 1968

 

1.    Les étudiants eux-aussi sont mécontents : ils font les frais de N réformes qui se succèdent sans succès ; l'arrivée de la vague de jeunes du Baby-boom à l'Université ne se satisfait pas d'un enseignement et de structures vieillottes : on manque de locaux, de professeurs, de matériels pédagogique, etc. C'est la « contestation » partout !

De nombreux « groupuscules » plus ou moins marxistes, maoïstes, trotskistes. travaillent le monde étudiant.

⇒ le 2 mai 68, des incidents graves se produisent à Nanterre, alors en chantier, et les évènements se précipitent :

•        fermeture de Nanterre,

•        évacuation de la Sorbonne,

•        émeutes, barricades, affrontements violents avec les CRS, etc.

 

2.    Le mouvement s'étend aux ouvriers :

•         le 13 mai, (10ème anniversaire de la sédition d'Alger) 50% des salariés se mettent en grève

•        les occupations d'usines se multiplient ⇒ la paralysie complète du pays ;

•        les syndicats sont dépassés par la base : c'est du jamais vu depuis la fin de la guerre.

 

3.    Les pouvoirs publics sont dépassés :

•        Thèse des Gaullistes : c'est un complot communiste ; le peuple et la République sont menacés.

•        Analyse contestable : les communistes sont aussi dépassés que les autres !

•        Pompidou, Premier ministre, négocie les Accords de Grenelle avec les syndicats :

•       hausse moyenne des salaires de 10,5%

•       hausse de 35% du SMIG

•       hausse de 60% du SMA

•       le temps de travail est abaissé à 40h hebdomadaires ;

⇒ mais la base refuse : le problème n'est pas uniquement matériel ;  partout, on refait le monde dans des « assemblées générales »...

 

3.    Le pouvoir semble vacant :

•        Mitterrand abat ses cartes – trop tôt ! Il annonce sa candidature à une éventuelle élection présidentielle anticipée et propose un gouvernement provisoire...

•        le PC, Geoges Marchais en tête, fait défiler sessympathisants sous la bannière de la CGT

•        Mais : De Gaulle part à Baden-Baden pour s'assurer de la fidélité du général Massu, chef des armées en Allemagne.

⇒ Il veut se poser une nouvelle fois en sauveur de la République...

 

       4. Le retournement de la situation :

De Gaulle (discours du 30 mai 68) « prend ses résolutions » :

•        Il reste à son poste, de même que Pompidou ;

•        Il dissout l'Assemblée ;

•        Il menace de « l'article 16 » de la Constitution qui lui confère les pleins pouvoirs en cas de menaces sur la République ;

•        Il mobilise « contre la subversion »...

⇒ une énorme manifestation gaulliste remonte les Champs-Elysées : les forces conservatrices ont gagné ce bras de fer.

       ⇒  Le travail reprend peu à peu ;

⇒ Les élections législatives de Juin 68 sont la consécration du « parti de l'ordre » (363 sièges / 487).

Mais De Gaulle ne retrouvera pas la confiance populaire... Lors du referendum du 27 avril 1969, sur la régionalisation et la réforme du Sénat, le non l'emporte : le lendemain, le général démissionne.

 

En guise de conclusion : 40 ans après...

 

➢     N'en déplaise à notre orgueil national, l'année 1968 a connu sur le plan mondial (USA, Japon, RFA...) un mouvement largement spontané où les étudiants jouaient le rôle moteur

 

➢     Pourquoi ?

•       On peut citer en premier lieu la remise en cause de la société de consommation qui combine un travail aliénant (la chaîne) à une augmentation des inégalités ;

•       ⇒ une revendication du droit au bonheur, d'ailleurs inscrite dans la déclaration des droits de l'Homme , donc dans le préambule de la Constitution française... ce sont ls premiers mouvements hippies et l'apparition des préoccupations écologiques : on prêche le retour à la nature et l'élevage des chèvres en Ardèche; « Sous les pavés la plage ! »

•       c'est aussi le refus d'une société largement dépassée par l'évolution des moeurs : les jeunes demandent un peu moins de conformisme dans les rapports sociaux, tant à l'école (Cf? Le film « Diabolo menthe »), que dans la famille et dans l'entreprise où le système reste encore patriarcal..

•       Il n'est pas anecdotique que tout ait démarré, à Nanterre, de l'interdiction pour les garçons de rendre  visite aux filles à la cité universitaire..; (« Il est interdit d'interdire »).

 

Bref, c'est une crise de ras-le-bol : la société a fait craquer, heureusement sans casse, un corset que les élégantes avaient rejeté entre deux guerres ! Dommage que « l'imagination ne soit pas restée au pouvoir »

 

 

 

 

CHRONOLOGIE DE L'ANNÉE 1968

 

 

 

 

 

Le pb étudiant

•          * 22 mars 1968

•           

•          * 2 mai

•           

•          * 3 mai

•           

•           

•          * 3 mai au soir

•           

•          *10 mai

- Création du mouvement du 22 mars par Daniel Cohn-Bendit

 

- Incidents à l'université de Nanterre ˃ cours suspendus

 

- Grève à la Sorbonne : la police fait évacuer les locaux en dépit du "  droit d'asile " universitaire.

 

- 1ère manif. au Quartier latin > des affrontements violents

 

- Nuit d'émeutes et de barricades

 

Les étudiants n'ont plus de cours, les amphis siègent en assemblées générale ; les examens sont repoussés sine die

Le pb social

 

* 13 mai

 

- Les grèves s'étendent aux salariés : 9 millions de grévistes = 50% des salariés  ; les autres sont au chômage technique : plus de transports, essence rare, téléphone intermittent...

C'est le chaos économique.

 

Le pb politique

* 24 mai

 

 

 

 

 

 

 

 

* 27 mai

- Le gouvernement Pompidou est dépassé par cette sorte de folie collective.

- Les partis et les syndicats ont été surpris par ces mouvements spontanés issus de la base et n'arrivent pas à en prendre le contrôle. > négociations gouvernement / syndicats

 

- Signature des Accords de Grenelle :

         + SMIG de 30% ; devient SMIC.

         + baisse du temps de travail (44h / semaine)

         + création de la section syndicale d'entreprise

 

Fin de crise

* 29 mai

 

 

 

* 30 mai

 

 

 

* 31 mai

 

 

* juin

- De Gaulle s'envole secrétement pour Baden-Baden où station-nent les troupes françaises d'occupation en Allemagne (Gal Massu).

 

-Il annonce la dissolution de l'Assemblée nationale et de nouvelles élections législatives.> une imposante manifestation gaulliste sur les Champs Elysées.

 

- Un sondage donne 41% des voix aux gaullistes.

 

 

- Aux législatives, les gaullistes obtiennent 363 députés sur 487 sièges.

- De Gaulle propose  un referendum pour 1969.

    

La crise est terminée...Tout rentre dans l'ordre.

Publié dans Cours

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article